L'ETOILE ET SON HISTOIRE par Ghislain LANCEL

Eugène Magnier et Céleste Démarest
propriétaires du château (1875-1897)

Généalogie

Pierre Antoine Eugène Magnier, né à L'Etoile le 4 juillet 1826, décédé à L'Étoile le 21 août 1880, était tourbier en 1872, cultivateur, maire de L'Etoile de 1871 à 1880. Aucune photo ni portrait d'Eugène n'a malheureusement été retrouvé.

Il épousa, le 28 juin 1854 à Belloy-sur-Somme (Contrat de mariage, MLegendre, Picquigny le 17 juin 1854), Céleste Desmarest, sans profession, née le 27 septembre 1831 à Belloy-sur-Somme (fille de Jean-Baptiste, extracteur de tourbe, et de Clémentine Lesueur) [5 Mi D 737], décédée veuve le 17 décembre 1897 à L'Etoile.

Postérité :
1) Marie Eugénie Céline (1856-1933), héritière du château en 1898 ;
2) Pierre Jean Baptiste Edgard (1861-1901), dont son fils André deviendra propriétaire du château et de la totalité des parts de ses tantes en 1937 ;
3) Marie Clémentine Suzanne (1866-Long 1925).


Françoise Lemaire et Edgard Magnier (son époux), Céline Magnier, Suzanne Magnier
Céleste Desmarest, veuve, tenant René dans ses bras ; Robert et André à ses côtés
Vers 1892 (baptême de René Magnier, né en 1891)
[Photo Elisabeth Pecquet-Debierre]

Achat du château en 1875

Eugène Magnier achète en 1875 le château de L'Etoile et les parcelles attenantes (ancien enclos seigneurial) [3E 616]. Il décèdera seulement cinq années plus tard, en 1880, et c'est donc son épouse qui fut la seule propriétaire du château durant les 17 années de son veuvage. Quelques mois après le décès de Céleste, un acte de partage des biens fut passé pardevant MPaillart, notaire à Flixecourt, le 31 mars 1898, et par cet acte c'est Céline qui hérita du château, des cinq maisons et de l’étang, tandis que Edgard et Suzanne se partageaient des jardins, des pâtures et d’autres terres, avec une soulte de compensation en valeurs pour Suzanne.

Eugène Magnier, sa vie (tourbier)

L'achat du château n'a pas bouleversé la vie d'Eugène Magnier. Tourbier il était, tourbier il resta. Les archives privées comportent de nombreux documents (mais avec lacunes) relatifs à l'extraction et à la commercialisation de cette tourbe, tourbe qui, bien souvent, tenait encore lieu de combustible.

De 1864 à 1876, on relève de nombreuses quittances annuelles d'un montant élevé, pour location de terrains, celles de 1864 et 1868 s'élevant chacune à 683 francs pour droit d'étente de la tourbe accordé par Monsieur de L'Etoille (descendant de Jourdain de L'Eloge, dernier seigneur de L'Etoile) au lieu-dit La Houblonnière, et 1000 francs encore en 1868 au même propriétaire pour droit d'extraction de la tourbe. Les reçus de 1870 atteignent un total de 5070 francs pour l'ensemble des droits sur les parcelles des Petits-Prés et de La Houblonnière, mentionnant le 8terme depuis l'acte passé avec M. de L'Etoille le 7 avril 1872. On relève encore des reçus de 1164,50 francs en 1871, 1000 francs en 1872, 2164,50 francs en 1873, 494,50 francs en 1873 et 683 francs en 1876.

De 1877 à 1883, on trouve les traces de quatre jugements, pour tourbes livrées et non payées, contre Jean-Baptiste Berton manœuvrier à Saint-Ouen (condamné à payer 44 francs), Hector Parvillers voiturier à Saint-Ouen (36 francs, avec saisie par Saint-Frères, son employeur), Tathuillier ménager à Saint-Ouen (53 francs) et Anatole Fournier manœuvrier demeurant à Surcamps (69 francs).

Céleste Démarest, veuve, emprunts et château

Après le décès d'Eugène Magnier, en 1880, l'exploitation de la tourbe semble avoir cessé au profit d'une agriculture traditionnelle, témoin ce bail pour 9 ans à compter de 1890, passé à Abbeville par le mandataire de Paul Louis Marie Robert Tillette de Mautort (aussi héritier, par alliance, de Jourdain de Léloge) au profit de Madame veuve Magnier pour 1ha 60a 03 ca de terres aux Coutures et Bas des Coutures [vers Moreaucourt], à la redevance annuelle de 152,55 francs. Le bail est signé par Edgard, au nom de sa mère, ce qui pourrait indiquer qu'il est l'exploitant réel. Un autre reçu, le dernier, à Madame veuve Magnier, de 121 francs, relativement à des prés dans la Crulière, est daté du 19 juin 1897, soit quelques mois avant la mort de Céleste.

Le 1er mars 1883 (?) Céleste se lance dans un emprunt très important, une somme de 16 000 francs, soit presque la valeur de chacune des trois parts dont hériteront ses enfants lors de sa succession. Il faudra environ 25 années pour rembourser cet emprunt, à raison de 680 francs par année. Les reçus délivrés à Abbeville par le mandataire de R. de Mautor montrent la régularité des remboursements entre 1884 et 1899, le premier connu étant exceptionnellement de 765 francs pour une somme de 17 000 francs, celui de 1898 étant honoré par l'ensemble des membres de la famille Magnier (Céleste vient de décéder) et le dernier connu étant payé par Céline en décembre 1899 pour l'échéance 1er mars 1898 (alors que l'emprunt n'est pas encore totalement remboursé).

L'usage de cet emprunt n'est pas explicité et l'acte de succession des époux Magnier ne mentionnera aucun achat de terres d'une telle valeur durant le veuvage... L'emprunt pourrait donc être lié au château lui-même, et dans ce cas, on pense à son aménagement en logements meublés dès cette période et pas seulement du temps de Céline. D'ailleurs, en 1886, Céleste prendra une assurance pour ce château, "à usage d'habitation". Malheureusement, aucun des recensements ne peut confirmer cet usage locatif, aucun ne se situant dans la période du veuvage de Céleste, sautant de 1881 à 1906.

On l'a dit, quelques années plus tard, le 12 février 1886, Céleste prend une assurance sur le château et les bâtiments voisins, ensemble assuré pour une valeur de 20 200 francs par un contrat d'une durée de 6 ans et moyennant une cotisation annuelle de 16,10 francs ! Le château, à usage d'habitation, y représente la part la plus importante, pour 15 000 francs, mais ce n'est que quatre fois plus que le deuxième bâtiment [Maison Lheureux], à usage d'écurie et d'habitation (4 000 francs), tandis que le troisième bâtiment, à usage de remise et bûcher (certainement le deuxième bâtiment de la dépendance située dans l'alignement du château et qui en est séparée par 30 mètres d'après la mention sur le plan) est évalué 1 000 francs et que le quatrième article concerne un pressoir avec ses accessoires et divers objets se trouvant dans le précédent bâtiment, assuré pour 200 francs. Le plan sommaire porté au contrat mentionne des plants de part et d'autre du troisième bâtiment. Le contrat semble avoir été renouvelé puisque l'on trouve la trace du reçu de 1892, au même prix.

D'autres quittances sont relatives à des contrats d'assurance (indéterminés) plus importants : en 1890 pour 42,20 francs (n° 14574), de 1891 à 1897 (avec lacunes) pour 36,55 francs (n° 24782).

On relève aussi des reçus relatifs à des intérêts importants à payer par Céleste et qui commencent un an avant son décès. Le premier fait état de 700 francs pour intérêts échus le 1er janvier 1896, reçus par ME. Toupard à Flixecourt (28 janvier et 25 août 1897) et 325 de solde (sur 675 francs ?) pour 1897 (11 novembre 1897). Céline payera 675 francs en 1898 et 1899 pour le compte de la succession pour l'échéance de janvier 1898. Le second totalise 850 francs d'intérêts de l’année 1896 (reçus Cocquel-Crété, Amiens) les 4 février et 19 mai 1897. Encore une fois c'est Céline qui payera 1 040 francs pour l'échéance du 1er janvier 1898, mais par billet collectif avec ses frère et sœur (reçus Cocquel-Crété, Boves).

Céleste Démarest, fruits et divers

La mention en 1886 du pressoir, l'existence de plants situés de part et d'autre des dépendances situées dans le prolongement du château et la seule mention d'une écurie laissent penser que les ressources agricoles de la propriété tournaient pour l'essentiel autour de la production de pommes (dont une partie pour la production de cidre). Un vieux diplôme en trois morceaux témoigne d'ailleurs de la médaille d’or attribuée par la Société d’horticulture de Picardie et offert par la ville d'Abbeville à Mme Magnier-Desmarest, catégorie Fruits variés dans la décennie des années 1890 (année non complétée).

Quelques factures nous donnent une idée des préoccupations ou loisirs de Céleste : Facture du 28 mai 1895, de Fortecuerre-Lefèvre, vins, eaux-de-vie et liqueurs à Condé-Folie, pour divers achats d’une valeur de 134,90 francs. — Facturation : « Reçu de Madame Magnier Desmarest, à L'Etoile, la somme de ... [117,50] francs, pour prix d’un demi wagon de charbon. Amiens, le 13 octobre 1897 ».

 

Remerciements : Marius Pecquet [Archives privées Magnier/Pecquet n° 1 à 171], Elisabeth Pecquet-Debierre [Photo], Paul Pecquet, Charline Chamu-Pecquet et Régine Pecquet.

Dernière mise à jour de cette page, le 22 décembre 2006.

 

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