Cahier de devoirs mensuels (1915/1919)

Voir le cahier 1

Ce premier cahier de devoirs mensuels est celui de Michel Lejeune, né le 29 mars 1907, fils de Paul, l'instituteur en charge de l'école et classe des garçons des Moulins-Bleus de L'Etoile.

Le cahier, couvrant la période très particulière qu'est la Première Guerre mondiale, est un document d'histoire qui dépasse le cadre de ce village. Paul Lejeune était doublement concerné par cette guerre, d'une part parce que les instructions demandaient aux instituteurs de défendre auprès de nos enfants les valeurs de notre Patrie, mais aussi parce qu'il revenait de cette guerre après plus d'une année d'absence dans son école, vivant, mais sérieusement blessé par un éclat d’obus à la jambe gauche (12 novembre 1914, Niewpoort [Belgique]). Un autre Stellien, Richard Brunel, avait été "tué à l'ennemi" au même endroit cinq jours plus tard. Aussi, Paul ayant repris ses activités d'instituteur, l'on ne sera pas surpris si les exercices d'additions ajoutent des soldats et les soustractions soustraient des obus, si la dictée a pour titre Le drapeau avec pour première question à conjuguer Saluer le drapeau au présent de l'indicatif. Même le dessin n'est pas anodin, la Croix de guerre 1915.

Ainsi que nous en informe les couvertures (dont la première page mentionne par erreur Cours moyen), ce Cahier spécial de devoirs mensuels avait été institué par la circulaire du 31 août 1887. Chaque enfant avait le sien, comportant chaque mois un travail personnel. Ce cahier était conservé dans l'école mais rendu à l'enfant à la fin de sa scolarité. Il était demandé à l'élève, non d'être le meilleur, mais de progresser et, plus tard, de pouvoir regarder ce cahier sans en rougir, d'y retrouver un résumé de son enfance...

Le cahier de Michel comprend les années 1915 à 1919. Compte tenu des vacances (août-septembre), la progression devait donc être la suivante : CE1 (1915/16, pages 1 à 18), CE2 (1916/17, pages 18 à 30), CM1 (1917/18, pages 31 à 42) et CM2 (1918/19, pages 42 à 50).

Régis Guéant, ancien directeur des Moulins-Bleus, a bien voulu commenter l'esprit qui animait les instituteurs à l'époque où Michel Lejeune était écolier : " Je dois d'abord dire que cette famille m'est bien connue puisque les parents furent les maîtres d'école de ma mère à Saint-Léger-lès-Domart et que le fils Max fut à plusieurs reprises le député de ma circonscription. D'autre part le père et ses deux fils appartenaient au même club philosophique que moi. Ce qui me ravit surtout à la lecture des cahiers c'est à la fois tout ce qu'ils révèlent quant au seul moteur de l'effort en tant que moyen pédagogique et à l'observation stricte du bien penser de cette époque où il semblait que la mission des Hussards noirs de la République consistait à :

Lutter contre l'ignorance ;
Combattre l'alcoolisme ;
Reprendre l'Alsace et la Lorraine ;
Et garder son chapeau sur la tête aux passages des processions.

Le sujet des devoirs donnés, les principes moraux inculqués, les textes des problèmes, tout nous paraît aujourd'hui  ressortir du folklore et pourtant ces ménages d'instits accomplirent une œuvre gigantesque. Je tenais à te faire part de mon ressenti ; quand j'ai débuté en 1958 à l'Etoile, les choses n'avaient pas tellement changé ; la lecture des cahiers aura été ma madeleine. " (12/06/07).

Dernière mise à jour de cette page, le 27 juillet 2007.