L'ETOILE ET SON HISTOIRE par Ghislain LANCEL

Armoiries (Généralités et Famile d'Amiens)

 

Généralités

Les armoiries apparurent au milieu du XIIsiècle lorsque les cavaliers étant devenus méconnaissables sous leurs armures, des signes distinctifs furent peints sur leurs boucliers afin de les reconnaître durant les combats et les tournois. Lorsque ces signes furent stabilisés et transmis héréditairement ils devinrent des blasons, des armoiries propres à chacune des familles. Des règles s’instituèrent. Ainsi, une seule personne de la famille devait porter de son vivant les armes pleines (d’origine). Les autres membres de la famille, les fils du vivant du père, ou les puînés par rapport au fils aîné, devaient modifier légèrement ces armes par des brisures (modifications de couleur, adjonction d’un petit élément, etc.). Mais, de même que pour l’orthographe des patronymes naissants, le dessin des figures (chevrons, coquilles, etc.) présenta des libertés de représentation. Ces variations concernèrent également les écus (les supports où se trouvaient représentées les armoiries), de forme d’abord en amande, puis triangulaire et enfin, à l’époque moderne, à base en accolade.

On connaît plusieurs armoriaux généraux anciens et on commence à en trouver des publications de synthèses par marche d’armes [Popoff, Artois et Picardie (12 armoriaux dépouillés)]. Dans le même esprit il y a un armorial général qui semble dater du milieu du XVsiècle, seulement connu par deux copies, et dont on avait extrait l’Armorial de Picardie [MSAP, t. 18]. De nombreuses synthèses régionales de diverses époques furent également publiées. Pour le XVIIsiècle la référence incontournable est l’armorial dit de D’Hozier, lequel fut constitué à la suite de l’édit de 1696 qui faisait obligation d’enregistrer les armoiries, moyennant 20 livres de taxation par fief…, et même imposait d’office des armes à ceux, – bourgeois, communautés, etc. – qui n’en possédaient pas mais dont les ressources pouvaient en justifier la possession ! Ce recueil monumental (qui n’est donc toutefois qu’un armorial et non un nobiliaire) constitue 69 volumes – dont la moitié avec des blasons peints – bien heureusement sauvegardés à la BN [Fr 32220 et 32253 pour la Picardie]. Borel d’Hauterive en publia plusieurs extraits, dont le tome 2 de son Armorial, Artois et Picardie (1866) Les 1070 premières armoiries (jusqu’à la page 89) furent enregistrées avant le 14 août 1698. Celles de la 3e partie (après la page 152) furent pour la plupart attribuées d’office dans les deux années qui suivirent. On consultera également avec attention les titres produits devant M. Bignon, pour la Picardie [BMA, H 4344 et Pic 40]. Reste que c’est essentiellement par les sceaux appendus au bas de parchemins, s’ils sont conservés, que nous pouvons déterminer avec certitude les armes spécifiques d’un membre d’une famille à un moment donné.

Famile d'Amiens

La famille noble d'Amiens concerne L'Etoile jusqu’en 1282. Les représentations ci-dessus ont été numérisées en ayant pour modèle, (a) un fragment de sceau de Jean d'Amiens en 1248 [78 H 16] ; (b) une gravure en noir et blanc publiée par J. Noulens, Maison d'Amiens (1888), p. 71 (écu supporté par deux chiens et surmonté d’une couronne de comte, sans justificatif, ces chiens étant toutefois reconnus sur un blason daté de 1412 dans Inv. de la coll. Clairambault, n° 134), pour première source, et le blason peint du Nobiliaire attribué à Rousseville [BMA, Ms 3132, p. 23], pour seconde source.

La description des armoiries de la Maison d'Amiens est invariablement de gueules, à trois chevrons de vair (rouge avec 3 chevrons formés de clochettes bleues et blanches). Le vair, qui tient son nom du petit écureuil jadis fréquent dans les forêts d’Europe et dont la fourrure gris-bleue sur le dos et blanche sur le ventre était prisée pour les doublures des vêtements des costumes médiévaux, formait par alternance sur les chevrons des armoiries ce que l’on a ensuite décrit comme étant des clochettes bleues et blanches. D’après De Court, le choix du blason d'Amiens remonterait à Guy (Wido) d'Amiens, Gui d'Amiens, se disposant au voiage de la Terre Sainte avoit changé ses armes, ainsi que firent plusieurs seigneurs, et prit de gueule à trois chevrons de vair, mais il mourut en 1146. [BN, Picardie 2, p. 528]. Cette disposition remonterait donc à la 2e croisade (1147-49), mais pour cette période on admet maintenant qu’il faut émettre des réserves sur l’existence d’armoiries. Il n’est d’ailleurs pas non plus formellement établi si c’est Guy, ou son épouse Mathilde, qui était fils, ou fille, de la famille d'Amiens…

De fait on ne trouve la confirmation de ces armoiries ni pour ce Guy, ni pour Aleaume son seul fils, ni encore pour Dreux, fils (aîné ?) d’Aleaume, mais seulement à partir de la génération suivante, en l’an 1200. Les armoiries sont alors portées pleines par Pierre d'Amiens, fils aîné de Dreux, unique héritier de la famille d’Amiens. Pierre étant décédé sans postérité en 1204, on trouve en 1209 les armes pleines portées par Regnault, son frère cadet, sceau qu’il dit d’ailleurs secret ! Bernard et Thibault, deux des trois autres frères portent avec certitude des brisures, respectivement en 1226, 1238 et 1252 (le sceau d’Aleaume, en 1225, est malheureusement indistinct). Lorsque Renaud décédera ce sera son fils Jean qui portera les armes de la Maison, et ce, du vivant de ses oncles. En 1274, Dreux, fils aîné des héritiers de Jean, porteront naturellement les armes pleines. Les armes de la Maison d'Amiens étaient encore portées par des descendants en 1696 [Armorial de d’Hozier, n° 155 du registre 1er d'Amiens et n° 42 du registre 1er de St-Pol]

Autres sources

1176 : la dalle funéraire d’Aleaume, si on la retrouvait, devrait comporter les plus vieilles armoiries de la famille…

1200 (juin) : un sceau de Pierre d'Amiens, représentait trois chevrons vairés [selon Noulens, p. 101-102 qui cite les Arch. de l’abbaye du Gard, Yseux, 74 (n'a pu être retrouvé)]. Ce serait la plus ancienne description authentique d’armoiries de la famille d'Amiens, que Pierre portait comme fils aîné, son père étant décédé.

* 1209 (9 avril) : sceau en partie brisé de Regnault d'Amiens [Douët n° 1171 – Noulens, p. 110]. A cette date Pierre, fils aîné, était décédé. C’est le plus ancien sceau connu de la Maison d'Amiens avec ces armes. On remarquera la mention du contre-sceau : secretum meum michi !

* 1220 : sceau de type équestre de Regnault d'Amiens, montrant l’écu dégradé, mais contre-sceau assez précis portant les chevrons et mentionnant en latin l’année 1220, appendu au bas d’une charte datant de 1225 [AN, J 428, n° 1. – Gravures dans Noulens, p. 116-117].

1224 (février) : sceau de type équestre d’Aleaume d'Amiens (60 mm), et contre-sceau indistinct de l’écu. Dans ce dernier, très peu lisible et de petite taille (15mm), on semble y reconnaître les deux chevrons, mais une brisure devait y figurer qui n’est pas décelable [Douët n° 1169 – AN, J 231, n° 3. – Gravures dans Noulens, p.347].


Aleaume d'Amiens (AN J231/3, copie de moulage commercialisé)

1225 : sceau de Renaud, identique à celui de 1209, mais qui n’est plus dit secret [Douët n° 1172].

* 1226 : Bernard (trois chevrons de vair, brisé d’un vivré en chef) [Demay, Picardie, n° 87]. Ses armes portaient donc en brisure de grandes dents de scie en bordure.

1238 : sceau de Thibaut, de famille avec brisure au franc canton [Demay, Artois, n° 113].

1244 : sceau de Jean d'Amiens [DV, 361/5 (avec source), N., p. 122 (descriptif sans source)]. Jean semble porter les armes pleines de son père défunt alors que deux de ses oncles sont encore vivants. Mais la description du sceau (non retrouvé) est-elle rigoureuse ?

1248 (août) : sceau de Jean d'Amiens, Ecu chevronné de vair [Demay, Picardie, n o 89 – 78 H 16].

* 1252 (avril) : sceau de Thibaut d'Amiens « trois chevrons de vair au franc canton fretté ? » [3 G 300 – Demay, Picardie, n o 90]. Ainsi le dernier vivant des cinq frères ne portait pas les armes pleines !

1263 : Pierre, fils de Thibault [Demay, Artois, n° 111]

1274 (mars) : sceau de type équestre de Dreux d'Amiens, et contre-sceau sur lequel les chevrons sont visibles [Doüet, n° 1170 – AN, J 229, n° 19 (armes non microfilmées). – Gravure (approximative) dans Noulens, p.131]. Fils aîné de Jean, son père décédé, il porte les armes pleines.

*1284 : Gilles, petit-fils de Thibault I, fils de Pierre, avec pour brisure franc canton chargé d’un lion ? passant [Demay, Picardie, n° 88].

*1288 : Thibault II, fils de Thibault (armes de son père) [Demay, Picardie, n° 91].

*1412 Pierre, armes de la famille de Thibault [Clairambault, n° 134].

*1417 Jean, de la maison ! Un cadet, probablement de la famille de Thibault, qui a repris les armes pleines … [Clairambault, n° 133].

 

Ouvrages :

1642 : Blason dessiné et peint par La Morlière [Recueil... Amiens (à la suite de Antiqvitez....), p. 28].

1708 : Armes coloriées dans le nobiliaire de Rousseville [BMA, Ms 2132, p. 23].

1882 : Ecu timbré d'une couronne de prince (gravure non justifiée) [Ouvrage anonyme, BMA, Pic. 504].

 

Armoriaux :

1696 : deux blasons (dont l’un curieux) [BMA, Pic 504]

Plusieurs autres (dont Urfé, Sicile, et une représentation dans Le Blancq, mais avec chevrons laissés en blanc) [Popoff].

 

 

Conception numérique des blasons : Ghislain Lancel

Première publication, le 2 septembre 2014. Dernière mise à jour de cette page, idem.

 

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