L'ETOILE ET SON HISTOIRE par Ghislain LANCEL

Collection privée de cartes-photos de Céline Magnier (1916)

Il existe une extraordinaire collection de cartes-photos du château, et des dépendances, aujourd'hui en grande partie détruits...

Lors de la recherche générale des cartes postales de L'Etoile, il s'en est trouvé une, en réalité une photocopie du recto d'une carte-photo, d'aspect fort curieux en ce qu'elle comporte imprimée une inouïe étiquette portant la mention manuscrite blanche "L'Etoile"... Plus tard, deux autres cartes-photos, des originales cette fois, montrèrent la même particularité ! A y regarder de plus près, ces cartes ont aussi une autre singularité, celle d'avoir une ou deux encoches noires sur l'un des bords. Mais bien plus précieux est que ces cartes représentent toutes une partie du château ou de ses anciennes dépendances ! Pas de doute, il s'agit d'une collection privée, n'ayant pu appartenir qu'à un ancien propriétaire du château !

Il est vraisemblable que les clichés et/ou tirages de cette collection furent réalisés par un habitant du village plutôt que par MM. Devillers ou Caron, éditeurs de vraies cartes postales en ces mêmes années. Les deux marques noires arrondies (étroites ou larges) sont caractéristiques des traces laissées par les deux pinces qui servaient à placer le papier photo dans le bain du révélateur puis dans celui du fixateur sans laisser de traces de doigts. C'est donc un amateur disposant d'un labo-photo et ne se préoccupant pas des marque laissées par les pinces qui a réalisé ces tirages. Les petites étiquettes portant la mention manuscrite L'Etoile en blanc, toutes différentes, avaient donc été écrites au préalable à l'encre noire (encre de chine) et disposées, une par une, sur chacun des papiers photos, avant l'insolation sous l'agrandisseur photo. Ainsi s'explique, dans le seul cas où l'on dispose de deux exemplaires (plus exactement d'une photo et d'une carte-photo), que la photo présente une étiquette et une seule marque noire, tandis que la carte-photo comporte deux marques mais pas d'étiquette ! Le fait qu'au verso on trouve les habituelles mentions imprimées de Carte Postale n'est pas incompatible avec un travail d'amateur ; il est vraismeblable que dès 1916, comme ce sera le cas plus tard, l'on pouvait déjà acheter du papier photo avec un verso cartonné portant cette mention de Carte Postale.

Le château et ses dépendances, collection Céline Magnier (1916)

De nouvelles recherches permirent de trouver 5 autres cartes de la même série, dont 4 nouvelles et un doublon photo et carte-photo ! L'une des cartes est particulièrement intéressante pour avoir voyagé, et non seulement être datée (15 mars 1916) et signée (Céline Magnier, alors propriétaire du château) mais pour laisser transparaître les circonstances de la réalisation de cette série, en ce temps de guerre : envoyer à un neveu une photo montrant les quatre fidèles de la maison (sans oublier le chien), groupe photographié qui "rappelle les jeunes années et celles qui ont précédé la triste époque de la guerre".

Un regret concernant une personne qui n'était pas présente le jour de la photo montre que toute la série des photos aurait été réalisée le même jour 15 mars 1916. Toutefois la tenue de Céline est différente sur les autres clichés.

 

Cette photographie représente l'aile du château de L'Etoile. Sur le mur pignon, sous la toiture, est gravée l'année 1813. Trônant au sommet de la double coupole de la tourelle, on semble voir de profil le hallebardier – bien chancelant – qui est cité par les historiens locaux (Goze, etc.) Est-ce le même que celui qui se trouvait sur le pigeonnier ? [Coll. Paul Pecquet (voir aussi CP 348, et verso CP 349)].

A n'en pas douter, la série comporte aussi une photo de la façade principale du château, mais cette carte n'a pas encore été retrouvée...

Extraordinaire maison, malheureusement détruite, que l'on croirait tout droit sortie d'un parc d'attraction de Walt Disney !

Trois femmes sont photographiées. Céline Magnier est à droite. La femme du milieu, cheveux blancs et tenue claire, semblant très âgée et assise devant la porte ouverte de la maison, est certainement une locataire. Lucienne Tellier (1833-1917), bien que recensée seule en 1911 avec un numéro d'immeuble qui semble correspondre aux meublés du château pourrait-être cette dame très âgée [Coll. Elisabeth Pecquet-Debierre].

Cette maison fut ensuite appelée "Le fruitier" pour avoir servi à y entreposer des fruits. Elle se trouvait dans l'alignement du château, au plus près de celui-ci. Cette maison est encore bien visible à la loupe sur une ancienne carte postale CP 289 (maison se trouvant le plus près du pigeonnier).

A remarquer les initiales entrelacées CM, visibles au-dessus de la porte dans un cadre de fer forgé. Ces initiales sont certainement celles de Céline Magnier, célibataire. Ce serait dire qu'elle habita cette maison une partie de sa vie. Bien que moins probable, on peut penser aussi pour ces initiales à Celeste Desmarest, épouse Eugène Magnier. Voir une photo plus récente de la même maison où l'on voit beaucoup mieux les initiales CM (communion d'Elisabeth Magnier, vers 1960).

Cette photocopie (l'original n'a pas encore été retrouvé) montre l'une des dépendances du château qui se trouvaient dans son alignement (la plus éloignée, la plus au sud). Devant la maison, on distingue un jardin enclos dans lequel picorent quelques poules. A gauche, devant la porte, est photographiée une femme en tenue noire et tablier blanc. La partie gauche de cette maison en est toujours habitée (Marius Pecquet) [Coll. Jacky Hérouart (voir aussi CP 146)].

Cette demeure est aussi bien visible à la loupe sur une ancienne carte postale CP 289 (maison la plus à gauche).

Cette photographie, où Céline Magnier se tient à gauche, représente la façade sud d'un bâtiment, aujourd'hui détruit, que l'on appelait la Maison Lheureux, du nom de cette famille qui l'habita longtemps, au premier étage. Après le départ des derniers locataires le bâtiment avait été utilisé en atelier et cidrerie. Le bâtiment était disposé perpendiculairement au château et séparait jadis la Cour d'honneur du château de la Basse-cour, celle de la ferme attenante. Il touchait au chemin privé donnant accès aux habitations de construction récente (en particulier à la maison de Paul Pecquet, implantée à l'emplacement de l'extrémité sud de ce bâtiment) [Coll. Paul Pecquet].

Voir une photo des ruines (mai 1965) de la même façade du bâtiment, vue sous l'angle opposé (Communion de Jean Pecquet, en présence de l'abbé Goubet, second officiant)

Cette maison est encore aujourd'hui aisément reconnaissable, étant la première de la rue Saint-Martin, à proximité de la Place du Luxembourg (gîte Merchat). La femme photographiée était à n'en pas douter la locataire des lieux (voir ci-dessous), que l'on retrouve avec la même tenue sur les deux cartes suivantes du lot. [Coll. Marius Pecquet (voir aussi CP 350, et verso CP 351)].

 

C'est cette carte-photo exceptionnelle, pour avoir voyagé et comportant une correspondance significative, qui a permis de déterminer l'année de réalisation de la collection privée (1916) et le nom de la personne à l'origine de cette collection (Céline Magnier). La photo, prise dans la cour, montre l'arrière de l'habitation de la ferme extérieure longtemps associée au château, ferme de la rue St-Martin (actuellement gîte Merchat). Céline Magnier (1856-1933), propriétaire du château, envoie cette carte à René, l'un de ses neveux. Auguste est vraisemblablement Auguste Huchin (°1858), recensé comme tisseur chez St-Frères demeurant dans cette maison en 1911. Il est présumé qu'il complétait ses revenus en travaillant aussi à la ferme. Ni Philomène, présumée alors locataire de cette maison, ni Clotide, ni la petite fille photographiée n'ont été identifiées. Voir la carte précédente et la suivante [Coll. Paul Pecquet].

Transcription de la correspondance, au verso :

L’Etoile, Somme, 15 mars 1916. Cher René, Je t’envoie aujourd’hui une vue qui, je crois, te fera plaisir. Nous nous sommes réunis, les quatre fidèles de la maison, ainsi que le glorieux Mopy (Stopp?), pour vous adresser ce groupe qui vous rappelle les jeunes années et celles qui ont précédé la triste époque de la guerre. Auguste et Philomène n’avaient jamais été photographiés, cela n’est pas pour leur déplaire. Quand à Philomène, elle en est toute énervée. Clotilde a eu un gros ennui de ne pas l’avoir su, elle serait venue, dit-elle, se mettre en bas du perron, avec son seau au lait. Je l’ai fait poser sur une autre carte, mais cela ne fait pas aussi bien son affaire. Un baiser de Tante Céline.

 

Autre vue de la ferme de la rue St-Martin. On reconnaît Céline (en noir) sur la photo, la femme aussi présente sur les deux autres cartes (voir ci-dessus), et l'homme, certainement Auguste. Le garçon n'a pas été identifié. Voir la carte précédente, montrant la façade de la maison, et la première carte, aussi prise dans la cour. Par rapport à la première photo, on voit ici la partie droite de l'arrière de l'habitation (à gauche de cette vue). A remarquer que la carte-photo (à gauche) comporte deux marques noires mais pas la mention manuscrite L'Etoile, tandis que la photographie de droite porte la mention en n'ayant qu'une seule marque (mais le haut est coupé). [A gauche, Coll. Marius Pecquet (voir aussi PPP 19, et verso PPP 20) ; à droite, Coll. Paul Pecquet].

 

 

Remerciements à Marius Pecquet (époux de Colette Magnier), à Paul, Elisabeth et Anne (leurs enfants, arrières-petits-neveu et nièces de Céline Magnier), à Jacky Hérouart (photocopie inédite et commentaire sur les tirages photos amateurs), ainsi qu'à Charline Chamu-Pecquet et Régine Pecquet.

Dernière mise à jour de cette page, le 23 novembre 2007.

 

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