L'ETOILE ET SON HISTOIRE par Ghislain LANCEL

Les pavages de l'église de L'Etoile

Le sol de l'église était initialement en terre battue. Dans les derniers siècles un ou plusieurs pavages embellirent ce lieu de culte tout en le rendant plus praticable, notamment après les nombreuses inhumations qui en avaient perturbé la surface.

Le dernier pavage

Le plan du dernier pavage de l'église de L'Etoile, tel qu'il apparaissait lors de l'incendie de 1991, est annexé au rapport des fouilles de l'AFAN de l'an 2000. Il est bien approximatif. Ci-dessous, on en a corrigé l'emplacement de la ligne de rupture (noir/gris foncé) dans le mur nord entre l'abside et la nef (conformément aux autres plans). Par contre les dimensions et le nombre des carreaux du tapis, de l'entourage et des allées, ainsi que les dallages aux abords des marches intérieures de l'église sont restés incorrects, seulement schématiques. Les deux marches, peu mises en valeur dans le rapport, ont été rajoutées sur ce plan (en rouge, de part et d'autre du chœur au dallage oblique et du "tapis"). Elles délimitent certainement la partie des 22 pieds qui fut réservée à l'agrandissement du chœur en 1750 (mais avec des carrelages présumés postérieurs, de 1868 ?) Dans l'abside on distingue l'emplacement d'un ancien autel (de dimensions qui semblent différentes du dernier autel). Autour des anciens fonts baptismaux un lit de pierre, avec marche, aurait aussi été à positionner.

 

Ci-dessous, on trouvera les extraits du rapport de l'AFAN :

L’église est désormais ornée d’un sol carrelé et briqueté dont le dessin renseigne clairement sur le mode d’utilisation de l’édifice.

La nef. L’espace est divisé en deux parties presque égales par une allée centrale large de 125 cm commandée par la porte principale de l’église. Un diverticule large de 143 cm permet de rejoindre la première petite porte latérale sud. Les deux allées sont couvertes d’un tapis de carreaux de pierre plate organisés en damier oblique noir [bleu-nuit] et blanc. Le reste de la nef, dévolu aux bancs, où l’espace n’est pas dévolu à la circulation, est traité en briques rouges posées à plat, selon des lits perpendiculaires à l’axe de la nef. L’ensemble est posé sans liant, seulement bloqué contre les parois.

L’avant-chœur. L’allée centrale mène à un espace qui, bien qu’architecturalement dans la nef, forme en fait un avant-chœur. Séparé de la nef par une courte marche, le sol est traité en damier identique à celui des allées, au centre duquel est disposé un vaste tapis polychrome. Constitué de dalles octogonales blanches intercalées de petites dalles carrées bleu-nuit, le tapis est encadré de cinq bandes décoratives : deux bandes de couleur rose encadrent un bande blanche et deux bandes de triangles blancs et rouges alternés. Cet espace est directement accessible de l’extérieur par une petite porte pratiquée dans le mur sud de l’église. Le sol en damier pénètre d’ailleurs dans l’embrasure de la porte.

Le chœur [ou abside]. Un emmarchement sépare le chœur de l’avant-chœur. Il est constitué de larges dalles de calcaire gris, disposées sur trois rangs. Hormis le nez de la marche, qui semble avoir été posé en même temps que le carrelage, les autres rangs ainsi que les quelques dalles quadrangulaires en calcaire qui subsistent dans l’abside, notamment au nord, sont vraisemblablement contemporaines du premier état de sol de la nef, c’est à dire le sol en terre battue [n°] 1003. Les nombreuses dalles manquantes ont été remplacées par un sol briqueté identique à celui de la nef. Les briques marquent aussi la petite marche latérale qui permettait de monter dans l’abside contre la paroi sud. L’interruption du sol en briques marque l’emplacement de l’autel : large de 228 cm et profond de 171 cm, il est relégué au fond de l’abside. Aucun vestige de cet autel n’ayant été retrouvé, on ignore s’il était maçonné ou en bois. Toutefois, il ne s’agit pas de l’autel qui a brûlé lors de l’incendie de 1991 : celui-ci était posé sur une estrade en bois qui couvrait plus de la moitié de la surface du chœur.

L’aménagement de l’église à la fin du XXe siècle. [...] La tribune construite entièrement en bois couvrait tout l’espace compris entre la façade et le piédroit des premières fenêtres. Elle reposait sur deux piliers octogonaux en bois. Elle abritait donc totalement la cuve baptismale et son estrade, ainsi que le sas d’entrée de la porte principale. Celle-ci, surmontée d’un arc en plein cintre, était en partie masquée par la tribune. Cette architecture légère avait été ajoutée tardivement, alors que les sols étaient déjà posés ; elle présentait l’avantage d’augmenter la surface utile de l’édifice et d’accueillir l’orgue, mais avait pour défaut d’en assombrir l’entrée et de confiner l’espace dévolu au baptême. Les bancs occupaient densément l’espace de la nef, mais se cantonnaient à la zone briquetée. L’empreinte des montants de ces bancs était encore visible sur le crépi du mur nord lors de la fouille. Dans l’avant-chœur n’était libre que le tapis central. Les espaces latéraux était occupés au sud par des chaises (la porte de service était condamnée) et au nord par le banc d’œuvre plaqué contre le mur, par l’harmonium, et par quelques bancs supplémentaires. Contre le mur nord, était posée entre deux fenêtres la chaire à prêcher. On en voit encore l’empreinte dans le crépi du mur, ainsi que les traces de l’escalier droit qui montait le long du mur depuis l’avant-chœur [...] [Rapport de fouille 2000, p. 41-44].

La première marche (abside/chœur)


La petite première marche, entre abside et chœur, est encore bien visible
L'autre marche a déjà été détruite par le bulldozer, décapant le sol pour enlèvement des gravats !


 

En 1995, le carrelage était encore en grande partie existant. Je relève que le chemin axial de la nef est formé de gros pavés carrés bleus et blancs (de 30 cm de côté). Le tapis carrelé de l’autel est un grand rectangle (3,27 m de long et 2,55 m de large) qui était composé de gros carreaux pseudo-octogonaux blancs (de 29 cm de côtés prolongés en carré) bloqués dans les angles et sur les côtés du tapis par des petits éléments carrés de couleur bleue. On compte donc 11 pavés blancs dans le sens de la largeur de l'église et 8 dans l'autre sens. La large frise qui l’entourait (51 cm de largeur totale) retenait l’attention ; elle était composée de cinq bandes dont deux étaient formées d’assemblages de pavés triangulaires roses, blancs et jaunes. De chaque côté du tapis on comptait 5 carreaux posés diagonalement.

La seconde marche (chœur/nef)

La seconde marche, séparant le chœur de la nef, se trouvait bien après le tapis de carrelage (contrairement au plan AFAN qui ne représente pas de zone avec carrelage différent entre le tapis et la nef). La distance d'un grand pas les séparait, avec un assemblage de grandes dalles blanches, de gros pavés carrés de carrelage et des éléments de la marche. On retrouvait d'ailleurs une composition semblable pour la première marche, mais cette fois au niveau supérieur et non au niveau du tapis.

1868 et 1874. Pavage du chœur et du sanctuaire, etc.

C'est certainement à l'abbé Bourgeois, avec le concours de la municipalité de l'époque, que l'on devait le pavage, du moins celui du chœur avec son tapis, qui fut en place jusqu'à sa destruction pour cause de fouilles en l'an 2000. Durant 15 années (1863-1878) l'abbé avait animé la paroisse avec entrain et conviction [Voir Prêtres]. Les chiffres des livres des comptes du Conseil de Fabrique traduisent eux aussi, surtout ceux des dépenses, la volonté du prêtre d'embellir dignement son église. Les dépenses des années 1868 et 1869 provoqueront un déficit jusqu'en 1871. Mais c'est au profit de l'église : Pavage du chœur et du sanctuaire : 118,75 F, mais aussi Chemin de la Croix : 545 F ; prolongement de la tribune et mobilier : 227,85 F ; Grand tapis : 70 F, etc. [V 436017 (1868)]. Et c'est certainement en souvenir de son oncle, mort curé de Flixecourt, que les orgues de ce village furent rachetées à un très bon prix et remontées à L'Etoile en 1869.

En 1874, on relève de nouveau une mention d'intervention sur le pavage, peut-être de la nef, dans un ensemble de coût élevé : Travaux à l'église concernant la voûte en plancher, les pavés et boiseries, montant à 1 500 francs et à supporter par la commune, la fabrique n'ayant plus de fonds [99 O 1619].

Novembre 1668 : repavage

Deux siècles, exactement, avant le pavage du chœur et du sanctuaire (voir ci-dessus), la nef était déjà "extrêmement dépavée et en très mauvais état". Un sol en terre battue ne pouvait donc n'être qu'antérieur à la fin du XVIIsiècle, du moins pour une grande partie de la nef. On imagine que ce sont principalement les inhumations dans l'église qui avaient mis à mal le pavage précédent. En novembre 1668 ce sont donc les habitants eux-mêmes, le curé et les marguilliers qui, déplorant que la nef soit extrêmement dépavée et en très mauvais, qui se réunissaient en assemblée après la grand-messe. Ils firent venir un briquetier de Vignacourt et conclurent un marché, dûment enregistré par acte notarié. Les pavés nécessaires au repavage de la nef seraient de mêmes taille et cuisson que le modèle à eux présenté, et seraient payés au prix de 60 sols la centaine, payables par les marguilliers en trois tiers. Les paroissiens obtinrent même – mais l'acte ne précise pas si c'est par suite d'habiles négociations ou par charité chrétienne – un cent de carreaux, offert pour ce marché ! L'acte comporte 11 signatures, dont celle du curé (Ferrand) et de familles bien connues (Cagé, Cormont, Saint, etc.) [Voir détails : 3 E 29787, acte 146].

 

 

Crédit photo : J. Hérouart (Première photo couleur, et extrait de la CP 259 pour les petits bancs) ; AFAN (Carrelage 5 et 13, et extrait de Image6Mariage2-1-88-2.jpg du CD) ; anonyme (ami de J. Hérouart)

Dernière mise à jour de cette page, le 29 novembre 2007.

 

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