L'ETOILE ET SON HISTOIRE par Ghislain LANCEL

Saint-Jacques-le-Majeur

Le Saint patron de l'église de L'Etoile est Saint-Jacques-le-Majeur, premier des douze apôtres à mourir martyr, mis à mort par l'épée sur l'ordre d'Hérode Agrippa, probablement en l'an 42. Sa fête était fixée au 27 de juillet dans les bréviaires (actuellement le 25 juillet). Le chômage de cette fête fut supprimé en 1748 par M. de la Motte [Corblet, Hagiographie, t. 4 (1874), p. 325].

La tradition de la mission de Jacques en Espagne commença à se répandre au VIIIe siècle : " après qu'une étoile eut miraculeusement révélé l'emplacement supposé de la tombe de saint Jacques. Cette tombe et son sanctuaire situés à Compostelle (nom qui dérive probablement de Campus stellæ, le champ de l'étoile) rivalisèrent avec Rome comme centre de pèlerinage. Toutefois, s'il nous est impossible de penser que saint Jacques ait visité l'Espagne, cela n'interdit nullement que les reliques de Compostelle soient les siennes" [Dict. Historique des Saints, dirigé par J. Coulson, 1964]. Signalons toutefois, à propos de l’étymologie de Compostelle, une plus probable déformation de compostellum, le tombeau.

Les pèlerins commencèrent à affluer à Compostelle à partir du Xe siècle. Pratiquement disparu au XIXe siècle, le pèlerinage connaît un regain de faveur qui se poursuit depuis la dernière décennie du XXe.

Vers 1870 Darsy ne comptait pas moins de 14 fois le vocable Saint-Jacques-le-Majeur (ou Saint-Jacques) dans la Somme [Bénéfice..., t. 2, p. 380]. Il est le patron d'une paroisse à Amiens et à Abbeville. Dans la cathédrale d'Amiens, ce saint se retrouvait presque à égalité avec St-Firmin. L'édifice comporte – ou plus exactement comportait – de nombreuses statues ou représentations du saint, et en particulier une chapelle sous le jubé (détruit vers 1755), alors appelée Trésorerie haute et le Trésor de saint Jacques, parce que des reliques de cet apôtre – dont le célèbre mentone S. Jacobi (menton de saint Jacques) – y étaient conservées. Cette précieuse relique, que l'on pensait disparue, aurait été transférée en l'église St-Jacques à Amiens. Rappelons que la cathédrale d’Amiens ne fut commencée qu'en 1220 et livrée au culte en 1264.

A. Rouche signale que le vocable, comme une mode, est associé à la date de création des villages. Il est surprenant qu'aucun historien n'ait jamais mis en relation Compo-stelle et L'Etoile (Stella). Il n'est pourtant pas inconcevable que le toponyme L'Etoile ait été à l'origine du choix du vocable Saint-Jacques-le-Majeur. L'inverse, qui suppose que ce site fut sur le chemin du célèbre pèlerinage, et qu'après avoir créé une chapelle, un village se développa et prit le nom de L'Etoile, est aussi possible, bien que moins vraisemblable. On pourra aussi noter que le livre II du Liber Sancti Jacobi, ouvrage dédié à la gloire de cet apôtre, est un recueil de miracles obtenus par l'intercession de l'apôtre, notamment au XIIe siècle. Or c'est durant ce siècle, si la plaque de porte gravée de l’année 1130 est significative, qu’aurait été érigée une première église à L'Etoile... Mais pour ce village le vocable de St-Jacques n’est attesté que depuis des dates relativement récentes, Sainct Jacques le 19 octobre 1593 dans une minute notariale [3 E 31139], St-Jacques le 15 décembre 1599 dans un registre paroissial certifié conforme par le curé. On trouve ensuite St-Jaque-le-Grand en 1608 (même registre) tandis que le vocable actuel complet St-Jacques-le-Majeur n’est pas relevé (parmi les documents consultés) avant sa mention dans un état des paroisses daté de 1689 environ ! [BMA, Ms 514].

Humbert Jacomet, dans Archéologia [septembre 1994, n° 304] étudie les statues de St-Jacques en majesté, dont fait partie celle classée de L'Etoile, présumée la plus ancienne de l'église. Il informe que de nombreuses représentations ont une "étonnante parenté avec les majestés de St-Jacques de Compostelle". Et cette imitation, poursuit-il, "servait aux yeux des pèlerins de retour de Galice, à restituer un peu de la puissance sacrale de ce sanctuaire". Le vocable de l'église de L'Etoile aurait-il alors fait suite à un pèlerinage à Compostelle de l'un des premiers seigneurs Leblond du village ? Dans cette option, ce serait seulement la dernière église, incluant ses réaménagements des derniers siècles, qui aurait été honorée de ce vocable (ce qui serait alors à mettre en rapport avec Arguvium précédant Stella...)

St-Jacques est évidemment représenté sous plusieurs formes dans l'église de L'Etoile. La plus ancienne est la statuette de St-Jacques en majesté, classée, en bois, du XVIe siècle. Une autre statuette (aujourd'hui détruite), en plâtre, représentait aussi St-Jacques dans son attitude habituelle. Le saint patron était aussi l'élément décoratif principal de la chaire. En 1905, le Conseil municipal avait offert un vitrail (le 2e du côté sud, n° 4) aussi dédié à St-Jacques.

 

Dernière mise à jour de cette page, le 11 février 2008.

 

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