L'ETOILE ET SON HISTOIRE par Ghislain LANCEL

L'arrivée des blindés allemands à L'Etoile
(20 mai 1940)

Tout comme au début de la Première Guerre mondiale c’est la rivière Somme qui, en 1940, est le point de mire des troupes allemandes. Cette modeste rivière redevient une ligne critique pour la France, une nouvelle étape à franchir pour ses ennemis.

En bombardant Abbeville et Amiens, Hitler avait espéré avec succès y attirer le maximum de troupes françaises. Ainsi il put détacher plus facilement des éléments entre ces deux villes, à tous les ponts de la Somme, puis prendre nos troupes à revers, notamment sur Abbeville, et disposer ainsi d’un accès vers la mer.

Les allemands arrivent à L’Etoile le lundi 20 mai 1940 vers 17 h 30 en provenance logique du nord du village. Partant d’Albert la 2ème panzerdivision fonce sans résistance en direction de la mer par Doullens, Bernaville et Domart. Elle parvient à L’Etoile en traversant les champs par la Vallée Delattre, entre Flixecourt et L’Etoile.

Tout d’abord ce sont des motocyclistes et des automitrailleuses qui traversent le village dans tous les sens sous les regards étonnés des habitants, qui ne s’expliquent pas ces nombreux aller et retour. Des voitures sonorisées demandent aux habitants de ne pas s’effrayer. Mais en réalité – on l’apprendra plus tard – ce sont les allemands qui sont paniqués. En effet la Somme n’est plus franchissable par le pont routier entre L’Etoile et Condé. Ce pont a été dynamité par le Génie Français. Faute de mieux, les allemands sont donc à la recherche d’une route leur permettant d’accéder aux deux ponts ferroviaires situés entre L’Etoile et Hangest. L’un de ces ponts sert à la S.N.C.F. pour sa ligne régulière, et l’autre à Saint Frères qui l’utilise en ligne privée en provenance de son usine de Flixecourt, avec aiguillage de connexion pour les Moulins-Bleus.

Les allemands sont agacés par cette situation imprévue. Les premiers éléments arrivés à L’Etoile découvrent les lieux, descendent et remontent la rue des Moulins Bleus à plusieurs reprises, vont jusqu’à la Somme. Ils explorent aussi le chemin de halage en direction d’Hangest mais le pont sous lequel passe la Nièvre pour se jeter dans la Somme leur paraît trop faible pour y faire passer leurs engins. Les allemands s’énervent. Soudain ils font demi-tour et foncent sur Flixecourt puis la Breilloire. Là, ils constatent qu’un des deux ponts, celui de la S.N.C.F., a également été dynamité. C’est le Génie français qui, le matin même de ce 20 juin, avait détruit ce pont en espérant stopper ainsi l’avancée des troupes allemandes. Mais de manière totalement illogique dans une stratégie guerrière, le pont privé Saint-Frères avait été épargné. On ne connaîtra jamais les raisons pour lesquelles ce pont fut épargné... (Voir Les ponts où Rommel est passé).

En fin de journée à partir de 18 heures, et le lendemain matin, les premiers chars de la 7ème division de Panzers du Général Rommel font leur entrée à L’Etoile et s’installent dans la pâture Collet, en haut de la rue des Moulins Bleus dans l’attente des évènements. D’autres prennent position dans les marécages des Ergonnes et dans les pâtures de droite en direction du pont avec des engins prêts à intervenir.


Ces photos proviennent d'un ouvrage allemand (qui n'a pas été retrouvé) traitant de la guerre en mai-juin 1940, dans le secteur allant d'Ailly sur Somme à Condé-Folie. Ces deux photos et la mention ("Artilleries lourde et légère en position contre des attaques éventuelles de blindés ennemis") sont identifiées comme concernant L'Etoile. D'après les anciens du village (M. Decaix, etc.), la batterie légère se trouvait dans les Ergonnes, derrière les habitations de la rue du Pont, pointée au nord vers la route de L'Etoile à Long, et la grosse batterie était installée sur cette route de Long, pointée sur L'Etoile, plus précisément sur le calvaire de Bouchon, point de passage obligé pour des blindés qui arriveraient du nord par la Vallée de Mouflers, la seule seconde possibilité hors route départementale après la Vallée Delattre.

La famille Lancel affirmait que c'est dès le soir de ce 20 mai que la Kommandantur avait occupé leur "chalet", la plus belle maison entourée d’espaces verts de la rue principale (aujourd’hui, 111 rue du 8 Mai) et que le portail en bois qui gênait l'entrée de leurs véhicules fut brûlé. Cette maison avait été désertée par Louisa Lancel-Bodereau quelques jours auparavant. Ce "Chalet Lancel" fut réquisitionné pendant toute la durée de l'occupation par les troupes allemandes.

Pour les habitants restés au pays le choc est psychique. La peur au ventre, les stelliens se cachent chez eux et n’osent plus sortir. Ils n’ont jamais vu de tels engins aussi énormes que déjà ils s’imaginent les dégâts qu’ils peuvent causer, d’autant plus qu’en face, de l’autre côté de la Somme, les troupes françaises sont là...

Les 2ème 3ème et 5ème Divisions Légères de Cavaleries Françaises comprenant chacune une brigade motorisée et une brigade à cheval équipée de blindés H39 et P178 excellents, ainsi que le 6ème bataillon du 44ème R.I.C.M .S., sont sous les ordres du commandant Mercury. Ils se trouvent côté sud de la Somme entre la Breilloire et Condé et font craindre le pire aux habitants de L’Etoile.

 

D'après une idée, un texte et une photocopie de Jacky Hérouart. Remerciements à mesdames Thérèse Debruyker et Yvette Sévaux, messieurs Rémy Decaix, Pierre Chevalier, Michel Desmarest, Eugène Dumetz, Marcel Bonnard, Gabriel Hérouart et à la famille Lancel, ainsi qu'à Régis Guéant.

Dernière mise à jour de cette page, le 3 juin 2007.

 

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