L'ETOILE ET SON HISTOIRE par Ghislain LANCEL
Période ancienne Période récente Divers (Auteur, liens, etc.) Accueil

Epicier ambulant et à la boutique, à L'Etoile

De nos jours nous prenons notre voiture pour aller dans les "Grandes surfaces". Elles rivalisent d’imagination, souvent par des promotions alléchantes, pour attirer les acheteurs. Faire les magasins est devenu un rituel qui se pratique en famille. Qui n’a pas un samedi rempli à ras bord un caddie ?

Il n'y a pas si longtemps, il n'y avait que de petits épiciers de village, parfois même seulement un épicier itinérant. C'est l'épicier qui venait à nous, il faisait sa tournée.

Paul Cresset, un gars de Bouchon surnommé "T’chot Paul", avait commencé comme livreur de lait à L'Etoile, lait qu'il allait chercher avec son âne et sa charrette dans les fermes de Moreaucourt et de Bouchon. Puis un cheval avait remplacé l'âne, Paul était venu s'installer à L'Etoile pour ouvrir une épicerie tenue par sa femme (Hélène Cailly), enfin il avait acheté un fourgon Citroën pour faire ses tournées.



De gauche à droite, Darius Debray, Paulette et Paul Cresset, Maurice Attilano et Jeanne Debray
Photo prise près du domicile de Darius Debray, non loin de l'Ecce-Homo

Après une longue matinée de tournées dans le village, un peu de repos bien mérité, et père et fille passaient à la boutique où Hélène avait aussi fort à faire. La journée ne se terminait jamais bien tôt et la semaine n'avait pas de fin ! Paul et sa famille travaillaient sept jours sur sept... sauf le dimanche après-midi.

Ces petits commerçants ambulants, comme Paul ou le boulanger qui pesait encore le pain dans son véhicule, étaient le relais des villageois. Pour certains, les Moulins-Bleus étaient loin du village, loin du pont, loin de tout, sans moyen de locomotion, surtout l’hiver. Alors ils se laissaient aller à raconter leurs petites histoires... et en contrepartie, Paul était sollicité comme un facteur pour transmettre un petit message à l'autre bout du village.

Tout a une fin ! Paul est décédé en 1966. Ses enfants, Paulette et Yves son mari, Jacques et Jacqueline, ont alors continué la tournée pendant quelques années, quelques année seulement, avant de l'arrêter définitivement. Toutefois, Jacques et Jacqueline, ainsi que Daniel, le petit dernier, ont continué à tenir l’épicerie ; et après le décès d’Hélène, leur mère, en 1979, Jacques continua seul, ajoutant même un rayon de fleurs. Mais les "Grandes surfaces" arrivaient depuis quelques années et se multipliaient. Les petits commerces disparurent l’un après l’autre, celui fondé par T’chot Paul aussi. Il ne reste plus aujourd’hui de boutiques à L'Etoile que celles du pharmacien et du boulanger, et de tournée que celle du boulanger pour nous rappeler cette époque.

Toutefois, le saviez-vous ? Le magasin est maintenant une habitation privée, mais les gens qui y vont disent encore aller... chez T'chot Paul !

Les épiceries de jadis !

L'Etoile avait compté plusieurs de ces épiceries (mais seul T'chot Paul faisait des tournées). Ces boutiques de village étaient peut-être moins gaies, moins achalandées que les magasins d’aujourd’hui, mais tellement plus conviviales. L’épicier connaissait tous ses clients, les appelait par leur nom, les tutoyait souvent, les femmes s’y rencontraient entre voisines et parlaient des peines et des joies. On y apprenait les dernières nouvelles du village, la naissance du petit dernier, la rougeole de la fille ou du garçon, mais aussi la mort du grand-père.

L’épicerie c’était des étagères un peu tristes derrière le comptoir et desquelles on ne pouvait approcher, mais c'était aussi des mottes de beurre que l’épicier coupait à la demande et des pâtes qu’il servait avec de grandes cuillers. N'oublions pas le café bien sûr ! La cafetière était en permanence sur le poêle, toutes les occasions était bonnes pour boire une « bistouille » entre amis ! Du fromage, il n'y en avait qu'un, le camembert L’Oiseau Bleu ! Le vin était servi à la « tirette », directement du fût en chêne. Pas de légumes ni de fruits, ça on le trouvait dans chaque jardin ! L’hiver il y avait toutefois des oranges et des mandarines. Elles embaumaient les magasins et les enfants les trouvaient dans leurs souliers le matin de Noël, avec les délicieux sucres d’orge ! Les bonbons, pas trop de choix, mais il y en avait dans de grands bocaux. D'autres contenaient les chewing-gum « gagnants » en papillote dont nous les enfants faisions de grosses bulles qui s’écrasaient sur le visage ou les lunettes, de quoi faire rire tous les copains et copines, et s'occuper pour un sérieux moment ! Mais attention, pas question de se servir, les bocaux étaient mis à l’abri des petites mains avides car les mamans n’achetaient des friandises que lorsque les moyens le permettaient… fantaisie rare parmi les produits utiles, bien loin de l’abondance et du superflu des magasins d’aujourd’hui.

Ah si, n’oublions pas les plaquettes de chocolat, grand luxe que l’on achetait exceptionnellement. Les enfants s'empressaient d'arracher le papier pour récupérer l'image dissimulée entre cet emballage et le papier aluminium qui recouvrait le chocolat. Les images Meunier, premières images de collection ! En avoir une nouvelle était une réjouissance, en avoir une en double était l'occasion d'échanges animés dans les cours de récréation des écoles. Les garçons se pâmaient devant les images d’artistes féminines comme Nicole Courcel qui fit ses débuts à l'écran en 1946, si belle actrice ! On n’oubliait toutefois jamais... de manger les carrés de chocolat !

D'après une idée et un texte de Charline Chamu-Pecquet, élaboré à partir de ses souvenirs, de ceux de Régine, sa sœur, et surtout de ceux précieux de Paulette Cresset-Têtu et Jacqueline Cresset-Clérentin. Photos : Paulette Tétu-Cresset et Jacqueline Cresset-Clérentin.

Photo couleur : Le magasin, ALIMENTATION GENERALE / Cresset - Cailly (n° 85 rue Jules Verne).

 

Dernière mise à jour de cette page, le 28 septembre 2006.

 

<< Accueil : Métiers d'autrefois