L'ETOILE ET SON HISTOIRE par Ghislain LANCEL

Historique et matériel des pompiers

Il n’est pas rare de relever dans les registres des délibérations du conseil municipal de L’Etoile des demandes de remboursements de frais occasionnés par l’extinction d’un incendie ou d’autres interventions, mais également pour des questions vestimentaires. Mais le registre le plus ancien ne date que de 1880 ! En dehors de copies de délibérations conservées aux Archives départementales et de découvertes fortuites l'historique des pompiers ne couvre donc qu'une période assez restreinte.

1838 (10 juin). Dans le cadre de la construction d'une nouvelle école, il est demandé au préfet l'approbation de l'aménagement de l'ancienne école des garçons en salle pour la tenue des séances du Conseil Municipal et magasin des pompes à incendies. L'avis sera favorable [ADS, 99 O 1618/Ecoles].

1845. Vu la demande de la commune (du 8 novembre 1844) signalant que, concernant le service des incendies, « le nombre de paniers à incendie actuellement en état de service (74) étant insuffisant », le préfet, en date du 28 janvier 1845, autorise la commune à acheter 46 seaux en toile imperméable, grand modèle, cinq mètres de rallonge de boyaux et raccords, et pour les 20 pompiers encore non habillés, des blouses bleues et des « calottes (casques) en bonne tôle vernie » [99 O 1618, dossier 5].

1855. Arrêté du conseil municipal (Célestin Lancel, etc.) contre les voituriers qui laissent stationner des véhicules chargés de cendres à l'intérieur du village et qui risquent de provoquer des incendies... [99 O 1617, dossier 1].

Vers 1858 la remise des pompes à incendies est construite rue d'Amiens. Placé près du centre du village, ce local est donc bien situé pour ce vieux village, mais il empiète largement sur la chaussée de la rue principale du village ! Il sera rasé en 1961. Il est vraisemblable qu'une pompe à bras fut achetée à la même époque, et qu'elle fut en usage jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale, avec l'implantation des bornes à incendie du réseau d'eau.

En juin 1886 on relève dans les registres du C.M. : « L’habillement des pompiers se trouve dans un délabrement complet qu’il y a lieu de renouveler la tunique, le pantalon, et les épaulettes et invite l’assemblée à délibérer sur la proposition qui lui est faite. Le conseil considérant que la tenue se trouve effectivement dans des conditions qui ne permettent pas d’en ajourner plus longtemps le renouvellement ; que les pompiers tiennent en échange de leur service à avoir une tenue convenable, et que si cette satisfaction leur est refusée, il y a lieu de craindre la dissolution de la compagnie. La commune à tout intérêt à conserver un corps de pompiers dont les services rendus l’hiver dernier lui ont acquis la reconnaissance de tous les habitants. Le conseil vote donc la somme de 1200 francs nécessaire au remplacement. »

   
Ces deux casques (chacun vus sous deux angles) avaient un plumet latéral.
Ils ne se différentient que par l'inscription sur la bannière (solidaire de la décoration frontale, fixée par un boulon) :
SAPEURS POMPIERS DE SAINT FRERES et SAPEURS POMPIERS L'ETOILE
Ces sont des modèles 1895, avec un cimier fixé par 2 vis intérieures (et non par 8 vis apparentes comme au modèle 1885)
A gauche, casque "Sapeurs pompiers de St-Frères" (Albert Hardy, tisserand et pompier des Moulins-Bleus)
A droite, casque "Sapeurs pompiers L'Etoile" (Octave Hérouart, médaillé "Union départementale des Sapeurs Pompiers-Somme").

En 1899, dans la monographie communale, on relève que la commune dispose, non seulement d'une, mais de 2 pompes à incendie (toutefois l'une était peut-être la propriété de l'usine St-Frères) et d'une subdivision de sapeurs pompiers.

En juillet 1938, le château d’eau est opérationnel mais les travaux de pose des canalisations enterrées durent plusieurs années, notamment à cause de la période de guerre qui met un frein à l’extension du réseau. Des poteaux d’incendie sont implantés en divers endroits de la commune, on abandonne alors l’usage de la pompe à bras (Voir l'incendie de la maison de Marthe Levé). L’on voit apparaître les dérouleurs des tuyaux qu’ils fallait rabouter les uns aux autres afin d’obtenir la longueur nécessaire. Très souvent un seul poteau était insuffisant et il fallait souvent avoir recours à un deuxième, voire à un troisième poteau, ce qui nécessitait autant de lances et d’énormes longueurs de tuyaux. Toutefois la vieille pompe à bras servira encore jusqu'en 1950 environ, puisqu'elle fut encore utilisée lors de l'incendie d'un bâtiment agricole à la Grippe, et cette fois pas besoin de faire la chaîne, l'eau fut directement prise dans les tonnes de récupération d'eau de pluie de la ferme.

Le 15 février 1939 il est créé une « Amicale des Sapeurs Pompiers » dont le président fera le lien entre cette amicale et le conseil municipal. On ne possède aucune archive à cette date de création. Cette amicale resta donc certainement informelle jusqu'en 1969.

Fin 1954, début 55, suite au départ des instituteurs, le logement de fonction de l’école des filles (Bol de lait) est loué à Marceau Foucart, cantonnier. Ce logement était doté du téléphone depuis déjà 1928. Le conseil municipal fait alors installer une sirène sur la toiture du Bol de lait. C’était dorénavant le cantonnier, ou son épouse, qui déclenchent la sirène. La commune devenait autonome et n’était plus tributaire de Saint-Frères pour avertir les pompiers. De longue date, Saint-Frères avait en effet disposé de son propre service d'incendie, et c'est la sirène de l'usine qui servait pour avertir la population des incendies communaux. Malgré la nouvelle sirène, il fut néanmoins toujours possible d’appeler l’usine en cas d’absence au local du Bol de lait.

1961 : Vieux d'un siècle, mais surtout gênant la circulation automobile, le local des pompes de la Rue d'Amiens est démoli.

Au 15 février 1969, trentième anniversaire de l'Amicale, une société est officiellement créée et dépose ses statuts à la préfecture d’Amiens. Le bureau se compose de Georges DEBRUIKER Président, conseiller municipal, élu régulièrement depuis 1953, porte parole de l’Amicale. Le secrétaire trésorier est Jean CORNETTE, mécanicien auto et sapeur pompier.

Au renouvellement du conseil municipal en 1971, ce sera Serge DAUSSY qui deviendra président et porte parole de l'Amicale, assisté de André CADET, secrétaire trésorier.

 

En septembre 1979 on assiste à une véritable révolution à l’Etoile dans le domaine de l’extinction d’incendie. L’usine des Moulins Bleus vient de fermer ses portes. On vide les locaux. Devenue inutile, la motopompe Saint-Frères est offerte à la commune. Des anciens pompiers de chez Saint-Frères étant également pompiers du corps local, l’utilisation de cette motopompe pour les besoins locaux ne pose donc aucun problème. De marque GUINARD elle était équipée d’un moteur de 203 Peugeot. Elle venait s’intercaler entre le poteau d’incendie et la lance. Elle offrait un grand confort d’utilisation que le branchement direct d’un tuyau sur le poteau et surtout une pression beaucoup plus élevée que celle des poteaux. Le doublement de la lance n’affectait pratiquement pas la pression.

En 1985 le vieux drapeau des sapeurs pompiers se trouvant délabré le conseil municipal avait décidé de pourvoir à son remplacement. Au cours d’une petite cérémonie R. Minard, maire, remet le nouveau drapeau à l’adjudant Bernard SEGARD.


De gauche à droite : André  CADET, secrétaire trésorier ; Franck DECAIX, sapeur ; Didier SEGARD, sapeur ; Eugène PICARD, sergent ; Jacky LAFOSSE, sergent ; Jocelyn GEET, sapeur ; Bernard SEGARD, adjudant ; Roger MINARD, maire ; Serge DAUSSY, président.

En mai 1991 devant l’évolution des équipements obligatoires, le conseil municipal, souhaitant conserver son C.P.I. (Centre de Première Intervention) vote l’achat d’un camion citerne. La motopompe, devenue insuffisante, n’interviendra plus qu’en complément du camion. Deux mois plus tard, le 17 juillet 1991, survient le tragique incendie de l’église Saint Jacques le Majeur. Le C.P.I., assisté de plusieurs centres de secours, intervient. Malheureusement, malgré tous leurs efforts, les équipes ne pourront maîtriser cet incendie, catastrophique à tous les niveaux. A partir ce cette date s’instaure un mauvais climat, et un désaccord se fait jour avec le centre de secours voisin (celui de Flixecourt), lequel prend de plus en plus d’ampleur tant au niveau des effectifs que du matériel.

Le 8 avril 1993, la dégradation se poursuit et le conseil municipal enregistre la démission de quelques pompiers. L’un d’entre eux a rejoint les rangs du centre de secours voisin tandis que les autres préfèrent rester neutre. Monsieur Jacky Lafosse, adjudant, est sollicité pour tenter de recruter quelques nouveaux membres bénévoles, mais c’est sans succès. Le 3 septembre 1993, le conseil constatant que le C.P.I., amoindri au niveau effectif, ne peut plus continuer d’exercer ses activités, prononce sa dissolution.

Le 19 juillet 1994 un inventaire de l’ancien corps des sapeurs pompiers est effectué (fourgon pompe tonne, motopompe, dévidoir, émetteurs, tuyaux, lances, costumes de cérémonie, etc.) Quelques mois plus tard l’ensemble du matériel et des habillements est dispersé aux plus offrants aux quatre coins du département.

Depuis cette date, il n'y a plus de Centre de Première Intervention à L'Etoile. Aujourd’hui (2008), le 18 du téléphone aboutit à Amiens et c’est Amiens qui déclenche le centre concerné.

 

Sur cette photographie prise lors de l'exposition de septembre 1978 à la salle des fêtes de L'Etoile, un mannequin avait été habillé avec une tenue de pompier d'avant les années 1965 (tenue et casque d'Octave Hérouart). Accroché au mur, à gauche : l'un des 6 sabres de cérémonie que comptait la compagnie. On voit la poignée d’un second sabre dans son fourreau au flanc gauche du mannequin. Au-dessous, le panier en osier (posé sur un strapontin) qui servait de filtre, de crépine. Lorsque les pompiers voulaient prendre de l’eau dans un étang, ils ficelaient un bout du tuyau dans le panier, lestaient le tout d’une pierre, refermaient les deux moitiés du panier et attachaient le tout avec une corde reliée à la berge. Ainsi le panier empêchait les plus gros détritus et les herbes de boucher les tuyaux. A droite, deux haches qui servaient à défoncer tout ce qui gênait les pompiers dans l'exercice de leur fonction, portes, fenêtres, plancher, etc. A l’intersection, un képi de cérémonie. La longue corde dotée d'un mousqueton avait plusieurs usages : tirer un noyé d'un étang, faire tomber un mur dangereux, etc. La lance et son tuyau étaient les instruments de base. A l'horizontale, derrière le pantalon du pompier, on voit une partie d'une très longue perche (4 à 5 mètres) terminée par un énorme crochet. Elle servait à ramener les noyés sur la berge. Cette encombrante perche était ordinairement rangée en haut du mur d'enceinte du chêteau, rue d'Amiens, à proximité du bâtiment des pompes.

 

N.B. Les archives départementales détienne un dossier Pompe à incendie et sapeurs pompiers qui n'a pas encore été étudié [99 O 790 (1852-1931)]

 

Remerciements : Jacky Hérouart (photographies et renseignements depuis 1886) et Bernard SEGARD (qui a permis de photographier l'ancien drapeau), Jacky Guillevic (datation des casques). Crédit photographique du casque de gauche (St-Frères), anonyme, coll. privée ; autres photos : J. Hérouart.

Dernière mise à jour de cette page, le 4 mai 2008.

 

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